Les ondes électromagnétiques décryptées : la synthèse de l'ASEF

C’est quoi une onde électromagnétique ?

Une onde électromagnétique est formée de la combinaison d’une onde électrique et d’une onde magnétique. Elle est définie par sa longueur d’onde et sa fréquence et désigne en fait une forme de transport d’énergie. Parmi ces rayonnements électromagnétiques, on peut citer les ondes radio et radar, les rayonnements infrarouges, visibles (lumière) et ultraviolets, les rayons X et gamma.

Les Sources d’exposition aux ondes électromagnétiques

Il existe plusieurs sources d’exposition quotidienne de l’homme aux rayonnements électromagnétiques.

  • Le champ électromagnétique terrestre: permanent, il varie selon la météorologie
  • Les champs électriques: lignes à moyenne, haute et très haute tensions permettant d’acheminer l’électricité (entre 220V et 400kV).
  • Les appareils électroménagers: tout appareil fonctionnant à l’électricité émet un champ électrique et lorsqu’il est allumé un champ magnétique.
  • Les écrans vidéos: ordinateurs et télévisions cathodiques ; ces écrans sont souvent remplacés aujourd’hui par des écrans plats qui n’émettent pas de champ électromagnétique
  • La téléphonie mobile et les antennes relais: ils représentent aujourd’hui la source la plus importante d’exposition aux rayonnements électromagnétiques.
  • Les bornes et cartes WIFI
  • Les cartes magnétiques sans contact (RFID)
  • Les lampes fluorescentes

Nous allons nous intéresser ici à l’exposition due à la téléphonie mobile, aux antennes relais et au WIFI.

La technologie des réseaux sans fil

Les réseaux sans fil permettent à au moins deux terminaux (émetteur/récepteur) de communiquer à distance via des transmissions radioélectriques relayées par des antennes-relais. Les ondes utilisées dans les technologies sans fil sont des ondes de radiofréquence ; contrairement aux rayons X ou gamma utilisés en médecine qui sont ionisants, les ondes de radiofréquence ne peuvent ni rompre les liaisons chimiques des molécules ni provoquer d’ionisation dans le corps humain aux énergies utilisées. Il faut toutefois noter que le Centre International de Recherche sur le Cancer (CIRC) a classé les champs électromagnétiques de radiofréquences comme «peut-être cancérogènes pour l’homme».

La téléphonie mobile

Exposition et normes

Les téléphones portables sont des transmetteurs de radiofréquence de faible énergie, qui utilise des fréquences situées entre 450 et 2700 MHz ; l’émission maximale se situe entre 0,1 et 2 watts. L’énergie émise décroît rapidement avec la distance, comme l’exposition de l’utilisateur aux radiofréquences.

Le DAS, c’est-à-dire le Débit d’Absorption Spécifique, est un indice indiquant la quantité d’énergie véhiculée par les ondes reçues par un appareil récepteur, lorsque cet appareil fonctionne à pleine puissance. Il est exprimé en Watt/kg. Plus le DAS d’un appareil radioélectrique est faible, moins cet appareil a le potentiel d’être dangereux pour la santé. Aux USA, la norme pour les téléphones est de moins de 1.6W/kg. L’Union Européenne a quant à elle établi un seuil à 2W/kg. La plupart des téléphones ont un DAS inférieur à 1W/kg.

Depuis le 15 avril 2011, le décret n°2010-1207 du 12 octobre 2010 impose au vendeur d’afficher sur le lieu de vente le DAS des équipements terminaux radioélectriques qu’ils proposent à la vente.

Enfin, depuis avril 2016, les normes concernant le DAS se sont durcies : la mesure doit être effectuée à 5mm au lieu de 25mm précédemment. Certains téléphones précédemment mis sur le marché ne sont donc plus conformes à ces seuils.

Le saviez-vous ? L’exposition aux ondes via la téléphonie fixe sans fil est la même que celle via la téléphonie mobile.

 

Encadré : la 4G

Succédant à la 2G et à la 3G, la 4G (4e génération) permet le très haut débit mobile, c’est-à-dire des transmissions de données à des débits théoriques supérieurs à 100MB/s voire à 1GB/s. D’après un rapport de l’ANSES d’octobre 2013, le déploiement général de la 4G s’accompagne d’une augmentation de l’exposition du public aux ondes électromagnétiques de l’ordre de 50%.

 

Effets sur la santé

Effets sur le cerveau

De nos jours, plus de la moitié des habitants de la planète sont concernés par les ondes de téléphonie mobile. Suite à des inquiétudes concernant les risques de ces ondes sur la santé humaine, principalement sur le cerveau, de nombreuses études ont été effectuées, sans parvenir à une conclusion définitive.

Une étude de grande ampleur, l’étude «Interphone», s’est penchée sur la relation entre l’utilisation de téléphone mobile et le développement de certaines tumeurs (gliomes et méningiomes) au niveau du cerveau [1]. Cette étude cas-témoins a été menée dans 13 pays selon un protocole commun, et a suggéré un risque accru de gliome et dans une moindre mesure de méningiome chez certains sujets particulièrement utilisateurs de téléphone portable. Cependant il a été impossible d’établir un réel lien de cause à effet.

D’autres études se sont penchées sur les effets des téléphones portables sur le cerveau. En 2012, une étude grecque sur des souris a montré que l’exposition au téléphone portable et aux émetteurs sans fil pouvait entraîner des modifications du cerveau susceptibles d’entraîner des maux de tête, vertiges, ou troubles du sommeil [2]. Une autre étude en Suède a montré une augmentation de 80% des risques de tumeur cérébrale après 1 à 5 ans d’utilisation du téléphone mobile [3]. En France, des travaux de l’Institut de Santé Publique, d’Epidémiologie et de Développement (ISPED) ont démontré une augmentation des risques chez les gens passant plus de 900 heures au téléphone dans leur vie, une durée atteinte en 5 ans lorsqu’on utilise le téléphone portable 30 minutes par jour [4]. D’autres travaux ont suggéré un risque de tumeur de la glande parotide chez les personnes utilisant leur téléphone plus de 45 minutes par jour [5].

Plusieurs analyses de littérature ont également fait état d’une corrélation entre l’utilisation du téléphone portable et le risque de trouble ou de maladie. Une méta-analyse récente de 24 études suggère que l’utilisation à long terme du téléphone mobile (plus de 10 années) augmente le risque de tumeur intracrânienne, plus particulièrement dans le cas d’une exposition unilatérale [7]. Encore plus récemment, une autre revue de littérature présente des résultats montrant une augmentation de l’excitabilité corticale et une diminution du temps de réaction lors de l’exposition aux ondes électromagnétiques, possiblement en lien avec des troubles du sommeil [8]. Enfin, une étude de 2011 a retrouvé un risque de développement de gliome ou d’astrocytome chez les personnes ayant utilisé leur téléphone 1h par jour pendant 10 ans ; le risque semble particulièrement important chez les moins de 20 ans [9].

Malgré toutes ces données, en 2013, l’ANSES a conclu à une absence d’effet des ondes électromagnétiques sur la réponse cellulaire cérébrale, la barrière hémato-encéphalique et l’expression de gènes impliqués dans la cancérogenèse. Il pourrait en revanche exister un effet sur la mort cellulaire neuronale et le stress oxydant ainsi que sur l’activité électrique cérébrale [10].

En 2016, un rapport préliminaire du National Toxicology Program of Cancerogenesis a été publié. Des rats Sprague Dawley® ont été exposés aux radiofréquences in utero et tout au long de leur vie. Ces études ont trouvé de faibles incidences de gliomes malins dans le cerveau et des schwannomes dans le cœur de rats mâles exposés aux radiofréquences couramment utilisées aux Etats-Unis (GSM, CDMA). Des lésions potentiellement prénéoplastiques ont également été observées dans le cerveau et le cœur de rats mâles exposés aux radiofréquences [6].

EFFETS SUR LE GÉNOME

Les résultats du programme « REFLEX », financé par la Commission européenne, le Gouvernement Finlandais et le Gouvernement Suisse ont été rendus publics en décembre 2004, lors d’une conférence par le Professeur Adlkoffer, directeur scientifique de la Fondation VERUM.  Il démontrait qu’une exposition chronique de très faible intensité aux champs électromagnétiques de la téléphonie mobile provoquait des ruptures simples et doubles de brins d’ADN sur les cellules humaines.

Au cours de l’année 2017, la suite des résultats de l’étude du National Toxicology Program suggère les liens entre l’exposition aux champs électromagnétiques de la téléphonie et le cancer. Un complément de l’étude [20] a été présenté lors du 48ème congrès annuel de l’EMGS (Environmental Mutagenesis and Genomics Society) du 9 au 13 septembre 2017.  Des lésions  significatives de l’ADN sont retrouvées dans le cortex des souris mâles, dans les leucocytes des souris femelles ou encore dans l’hippocampe des rats masculins.

Ces résultats suggèrent que l’exposition aux radiofréquences des téléphones portables provoque des lésions mesurables irréversibles sur l’ADN dans certaines conditions d’exposition. Ces résultats sont encore partiels puisque les conclusions définitives de l’étude sont prévues courant 2018 [21].

Effets sur la fonction reproductrice

Les effets sur le cerveau ne sont pas les seules conséquences possibles de l’exposition aux ondes de téléphonie mobiles. Une étude récente a montré que conserver son téléphone dans sa poche pouvait avoir des effets sur les spermatozoïdes en réduisant leur mobilité et leur viabilité [11]. Une autre étude a montré que l’usage du téléphone pendant plus d’1h par jour ou pendant la recharge entraînait une concentration anormale des spermatozoïdes [12].

Encadré : une responsabilité reconnue en Italie

Le 11 avril 2017, un tribunal italien a reconnu un lien entre l’utilisation du téléphone portable chez un homme de 57 ans et l’apparition d’un neurinome de l’acoustique, une tumeur bénigne touchant le nerf vestibulocochléaire et entraînant une surdité et des troubles de l’équilibre. Le travail de cet homme l’obligeait en effet à utiliser son téléphone portable entre trois et quatre heures par jour pendant quinze ans. Le préjudice corporel ayant été estimé à 23%, l’Institut National d’Assurance contre les Accidents du Travail a été condamné à verser à cet homme une indemnité à vie de 500 Euros mensuels.

Cette décision de justice n’est pas une première ; en Italie, la Cour de Cassation a reconnu comme maladie professionnelle une tumeur liée à l’usage intensif du téléphone portable. Aux Etats-Unis, le même jugement avait été rendu en 2006.

Les enfants et ados : une population à risque

Les adolescents possèdent quasiment tous un téléphone portable et l’ont de plus en plus jeune. En 2010, une étude sur les enfants américains a montré que l’utilisation de téléphones portables par les enfants de moins de 12 ans avait augmenté de 68% ces cinq dernières années aux USA. En 2010, 20% des enfants américains entre 6 et 7 ans utilisaient régulièrement un téléphone portable, contre 11,9% en 2005. L’augmentation la plus importante concerne les 10-11 ans, avec 80,5% d’utilisateurs de plus en 5 ans. Pourtant, face aux ondes électromagnétiques, les enfants sont plus sensibles que les adultes car leur cerveau est encore en développement et le risque de pénétration des ondes est plus important. Ainsi, les téléphones mobiles sont suspectés d’avoir un impact sur le développement neurologique des enfants. Une étude danoise réalisée sur plus de 13 000 enfants danois âgés de 7 ans entre 2005 et 2006 [13] a montré que les enfants utilisant un portable avant l’âge de 7 ans avaient 80% plus de risques de souffrir de troubles de conduite, d’hyperactivité et de troubles émotionnels. Le risque augmenterait en fonction de la fréquence d’utilisation et de l’exposition aux ondes.  Cette étude conclut également que le téléphone portable serait dangereux lors de la grossesse : les fœtus exposés aux ondes auraient 54% plus de risques de présenter des troubles du comportement dans sa vie.

Les habitudes des adolescents : l’enquête de l’ASEF

En 2012, l’ASEF a réalisé une enquête auprès de 600 lycéens âgés de 14 à 20 ans concernant leurs comportements téléphoniques. Cette enquête a révélé que les ¾ des adolescents ont leur premier téléphone avant 14 ans, et 1/3 avant l’âge de 10 ans ! 75% des adolescents questionnés révèlent dormir avec leur téléphone allumé sous l’oreiller, et le garder toute la journée sur eux. 42% d’entre eux passent plus de 30 minutes par jour au téléphone, mais ils utilisent leur appareil principalement pour envoyer des SMS, prendre des photos et des vidéos ou écouter de la musique.

En dessous de 12 ans, les médecins de l’ASEF déconseillent donc fortement l’utilisation du téléphone portable !

Les antennes relais

Les antennes relais permettent la réception et la diffusion de rayonnements électromagnétiques. Elles comprennent donc les antennes de téléphonie mobile mais également les antennes de télévision et les équipements de radiocommunication (gendarmes, pompiers…). Leur déploiement a commencé dans les années 1990 et on en compte aujourd’hui environ 60 000 en France ; les antennes téléphoniques sont les plus répandues.

Les normes

Le seuil légal d’exposition aux champs magnétiques des antennes relais est fixé selon la bande de fréquence des antennes. Les seuils sont donc de 41V/m pour la téléphonie mobile à 900MHz, à 58V/m pour les fréquences à 1800MHz et de 61V/m pour la téléphonie UMTS (3G).

Les seuls effets sanitaires considérés pour l’établissement des normes des radiofréquences concernent l’échauffement des tissus. Certaines associations dénoncent ces limites qui ne tiennent pas compte des effets biologiques, et demandent que le seuil soit abaissé à 0.6V/m. Plusieurs autres pays ont en effet des limites d’exposition inférieures (il y a eu des essais en Autriche à 0.6V/m). A Paris, une charte signée avec les opérateurs en 2003 a fixé une limite moyenne de 2V/m sur 24h.

Dans un rapport de 2009, l’ANSES appelle à la réduction de l’exposition du public aux ondes électromagnétiques [14]. L’agence préconise notamment la mise en place du principe ALARA («As Low As Reasonnably Achievable ») qui consiste à ce que la puissance des antennes soient réduites à la plus basse fréquence possible.

Les normes d’émission trop élevées posent problème, particulièrement pour les personnes sensibles telles que les personnes âgées, malades ou les enfants. Pour limiter leur exposition, le rapport Zmirou [15] établi en 2001 recommandait que les bâtiments « sensibles » (hôpitaux, crèches et écoles) situés à moins de 100 mètres d’une antenne relais, ne soient pas atteints directement par le faisceau de l’antenne.

Risques pour la santé

L’installation des antennes-relais est un sujet discuté. En invoquant le principe de précaution, des associations tentent de s’opposer à l’implantation d’antennes dans des lieux à risque, notamment près des écoles.

Une équipe en France mène des recherches concernant les effets biologiques des radiofréquences, notamment sur les fonctions de régulation thermique, le sommeil et l’alimentation. Certains résultats ont montré que l’exposition de rats à des champs électromagnétiques comme ceux émis par les antennes relais pourrait perturber la thermorégulation, la prise alimentaire et le sommeil [16].

Des recours limités pour en interdire l’implantation

Depuis le 26 octobre 2011, les recours pour faire interdire l’implantation des antennes-relais sont très limités. Auparavant, les citoyens pouvaient se référer au maire de leur commune, car ces derniers pouvaient agir sur l’implantation des antennes relais. Aujourd’hui, le Conseil d’État reconnaît la compétence exclusive de l’Etat pour réglementer l’implantation des antennes-relais sur le territoire. Désormais, seules trois autorités de l’Etat sont compétentes en la matière : le ministre chargé des Communications électroniques, l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (Arcep) et l’Agence nationale des fréquences (ANFR). Eux seuls ont le droit de déterminer, de manière complète, les modalités d’implantation des stations radioélectriques.

Il faut savoir que les antennes relais sont particulièrement abondantes sur les toits des HLM. En effet, un arrêté du 7 avril 2005 soumet l’implantation d’une antenne-relais sur une habitation au consentement du propriétaire, ou au consentement unanime des propriétaires pour une copropriété. Or dans le cas des HLM, seul l’office HLM doit donner son accord, sans que les locataires aient un quelconque pouvoir sur la décision. En échange de l’implantation des antennes, les opérateurs de téléphonie mobile paient un loyer à l’organisme de gestion ; avec cet argent, le bailleur est supposé améliorer le cadre de vie des locataires.

Les antennes-relais : l’enquête de l’ASEF (octobre 2011)

En 2011, l’ASEF a réalisé une enquête sanitaire sur l’impact des antennes relais sur la santé des riverains. Elle a été réalisée auprès de 143 locataires d’HLM d’Aix-en-Provence et d’Aubagne. Ces HLM ont été choisis pour la «fertilité» de leurs toits… par exemple on trouve à la Pinette à Aix-en-Provence 14 antennes-relais ! Un questionnaire élaboré avec l’association Priartem a permis de collecter des indications sur l’état de santé des locataires vivant à proximité de ces antennes. Acouphènes, troubles du sommeil et de la concentration ont été fréquemment retrouvés. Par exemple, 43% des gens interrogés ont répondu souffrir d’acouphènes, contre 15% dans la population Française. De même, 55% ont répondu avoir des troubles du sommeil contre 32% dans la population globale. Fait troublant, 83% de ceux qui ont la chance de partir en vacances voient ces symptômes disparaître au bout de quelques jours lorsqu’ils quittent leur domicile. Si le lien de causalité est difficile à établir, il y a là matière à réflexion…

Présente au « Grenelle des Ondes » en 2009, l’association a beaucoup travaillé sur la question des ondes électromagnétiques et sur la gestion de la prise de risque collective. Aujourd’hui, les résultats de cette enquête ne surprennent pas particulièrement le Dr Patrice Halimi, Secrétaire Général de l’ASEF et Chirurgien-Pédiatre à Aix-en-Provence. Il nous explique pourquoi : « Les résultats de cette enquête vont dans le sens de l’étude Bortkiewicz publiée en Pologne en 2004 ou encore de l’étude Abdel-Rassoul menée en Egypte en 2007 qui faisaient toutes deux le lien entre les troubles du sommeil et de la concentration et la proximité des antennes relais. On peut également évoquer l’étude Hutter réalisée par une équipe de chercheurs autrichiens en 2010 qui a démontré le lien entre antennes relais et acouphènes…Les locataires que nous avons rencontrés ont l’impression qu’on se moque d’eux. On ne leur a pas demandé leur avis pour savoir s’ils étaient d’accord pour qu’on leur implante des antennes relais sur leur toit. Ils ne touchent même pas d’indemnités financières pour ça et pourtant ce sont eux qui prennent et assument le risque…C’est anti-démocratique. En tant que médecins, nous estimons qu’il n’y a pas ni patient, ni citoyen de seconde zone ».

Le WIFI

Les effets sur la santé

Il ne faut pas l’oublier : le Wifi utilise lui aussi les ondes électromagnétiques. Les effets observés sont sensiblement les mêmes que ceux que l’on observe avec le rayonnement magnétique des téléphones portables. Mais en décembre dernier, une étude américaine a mis en lumière d’autres effets des ondes électromagnétiques [17]. Cette étude a montré qu’une exposition intensive à un réseau Wifi prolongée pourrait nuire à la qualité du sperme, en diminuant notamment la mobilité des spermatozoïdes et en dégradant leur ADN. Pour arriver à ces conclusions, les chercheurs ont effectué des tests sur des échantillons provenant de 29 hommes en bonne santé, âgés de 26 à 45 ans, en les exposant ou non à un ordinateur portable téléchargeant des données via une liaison Wifi et en conservant les mêmes conditions de température. Ils ont alors constaté que 25 % des spermatozoïdes placés sous l’ordinateur connecté au Wifi ne bougeaient plus après quatre heures d’exposition, et 9% avaient vu leur ADN endommagé. Les échantillons-témoins, éloignés de l’ordinateur, ne comptent que 14% d’immobilité et des dommages ADN minimes (3%) sur la même période.

Encadré : l’électrosensibilité

La sensibilité électromagnétique, également appelée intolérance environnementale idiopathique attribuée aux champs électromagnétiques ou électrosensibilité, est décrite comme un ensemble de symptômes causés par les champs et les ondes électromagnétiques. Ces symptômes sont divers mais les plus fréquents sont des symptômes dermatologiques (rougeurs, picotements, brûlures), cérébraux (fatigue, difficulté de concentration, étourdissements…), digestifs et cardiaques (palpitations). Selon les sondages, la prévalence de l’électrosensibilité dans la population va de quelques personnes par million jusqu’à 8% de personnes interrogées. 10% de ces cas d’électrosensibilité sont jugés graves par l’OMS. Dans certains cas, les patients vont jusqu’à s’isoler et changer leur mode de vie. Si des seuils d’exposition sont bien établis, les personnes qui déclarent souffrir d’électrosensibilité affirment réagir à des intensités très inférieures aux limites autorisées.

Si les symptômes décrits ont été reconnus réels par l’OMS, un lien de causalité avec l’exposition aux ondes électromagnétiques n’a pas été fermement établi. Plusieurs expériences ont été menées en double aveugle pour exposer des personnes électrosensibles à des champs électromagnétiques fictifs ou réels. Sur 31 études, 24 n’ont retrouvé aucune association entre exposition et symptômes ; 7 ont retrouvé une association positive mais 2 d’entre elles n’ont pas été reproductibles ; enfin 5 présentaient des biais méthodologiques importants et des résultats contradictoires [18].

Un rapport de 2005 de l’Agence de Protection Sanitaire du Royaume-Uni concluait que l’électrosensibilité devait être prise en considération indépendamment de son étiologie. En France, suite à une autre revue de littérature, l’ANSES a conclu en 2013 à une «absence d’effet sanitaire avéré chez l’homme» [10]. Ce rapport a néanmoins été controversé par plusieurs associations demandant la reconnaissance d’un syndrome spécifique. En 2015, une étude a proposé plusieurs marqueurs biologiques associés pouvant expliquer la pathologie [19].

En 2015, la justice française a reconnu pour la première fois l’existence d’un handicap grave dû à l’hypersensibilité aux ondes électromagnétiques. En 2016, une femme a obtenu l’autorisation du tribunal de remplacer le compteur d’eau à radiofréquences («compteur intelligent») par un compteur à relevé annuel.

Comment se protéger au mieux des expositions excessives aux ondes électromagnétiques

Les conseils de l’ASEF

En attendant que les scientifiques se mettent d’accord sur la nocivité ou l’innocuité des ondes électromagnétiques, il est important que chacun d’entre nous utilise son téléphone portable avec prudence pour limiter l’impact des ondes.

L’ASEF, signataire de l’appel des 20 recommande d’adopter les 10 conseils suivants :

  1. N’autorisez pas les enfants de moins de 12 ans à utiliser un téléphone portable sauf en cas d’urgence. En effet, les organes en développement sont les plus sensibles à l’influence possible de l’exposition aux champs électromagnétiques
  2. Lors de vos communications, essayez autant que possible de maintenir le téléphone à plus d’1m du corps (l’amplitude du champ baisse de quatre fois à 10 cm, et elle est cinquante fois inférieure à 1 m de distance). Dès que possible, utilisez le mode « haut-parleur », ou un kit mains libres.
  3. Restez à plus d’un mètre de distance d’une personne en communication, et évitez d’utiliser votre téléphone portable dans des lieux publics comme le métro, le train ou le bus où vous exposez passivement vos voisins proches au champ électromagnétique de votre appareil.
  4. Evitez le plus possible de porter un téléphone mobile sur vous, même en veille. Ne le laissez pas à proximité de votre corps la nuit (sous l’oreiller ou sur la table de nuit) et particulièrement dans le cas des femmes enceintes – ou alors le mettre en mode « avion » ou « hors ligne/off line » qui a l’effet de couper les émissions électromagnétiques
  5. Si vous devez le porter sur vous, assurez-vous que la face « clavier » soit dirigée vers votre corps et la face « antenne » (puissance maximale du champ) vers l’extérieur.
  6. N’utilisez votre téléphone portable que pour établir le contact ou pour des conversations de quelques minutes seulement (les effets biologiques sont directement liés à la durée d’exposition). Il est préférable de rappeler ensuite d’un téléphone fixe filaire (et non d’un téléphone sans fil qui utilise une technologie à micro-ondes apparentée à celle des portables…).
  7. Quand vous utilisez votre téléphone portable, changez de côté régulièrement, et avant de mettre le téléphone portable contre l’oreille, attendez que votre correspondant ait décroché (baisse de la puissance du champ électromagnétique émis).
  8. Evitez d’utiliser le portable lorsque la force du signal est faible ou lors de déplacements rapides comme en voiture ou en train (augmentation maximale et automatique de la puissance lors des tentatives de raccordement à une nouvelle antenne relais ou à une antenne distante).
  9. Communiquez par SMS plutôt que par téléphone (limite la durée d’exposition et la proximité du corps).
  10. Choisissez un appareil avec le DAS le plus bas possible par rapport à vos besoins (le « Débit d’Absorption Spécifique » mesure la puissance absorbée par le corps). Le DAS traduit le niveau de rayonnement électromagnétique des téléphones mobiles. Il doit être inférieur à 2 W/kg. Une valeur faible du DAS traduit une exposition aux ondes électromagnétiques plus faible. D’autres paramètres entrent également en compte : la distance par rapport à l’antenne relais ainsi que la qualité de la réception.

Comment vérifier l’exposition aux ondes électromagnétiques

Depuis le 1er janvier 2014, il est possible d’obtenir gratuitement une mesure de l’exposition aux ondes électromagnétiques. Pour cela, il suffit de télécharger et de remplir le formulaire Cerfa n°15003*01. Il doit ensuite être envoyé à la mairie, à l’agence régionale de santé ou à une association agréée. Ces organismes transmettent ensuite la demande à l’agence nationale des fréquences. Les résultats, exprimés en V/m, sont ensuite publiés sur le site Cartoradio.fr.

Comment faire pour continuer à téléphoner sans mettre qui que ce soit en danger

Pour savoir s’il était possible d’abaisser le niveau d’émission sans détériorer la couverture et à des coûts économiquement acceptables, un groupe de travail présidé par François Brottes (Député de l’Isère) – associant des représentants de l’Etat, des collectivités locales, des opérateurs de téléphonie mobile et des associations de défense des consommateurs et de protection de l’environnement – a réalisé une évaluation dans 17 quartiers pilotes représentatifs de la diversité des configurations urbaines. Des simulations de réduction de puissance des antennes relais jusqu’à 0,6V/m effectuée à Paris 14ème, Grand Champs et Grenoble ont montré qu’il y aurait 82% de perte de couverture de réseau à Paris, 44% à Grenoble et 37% à Grand Champs, surtout à l’intérieur des immeubles.

L’ASEF, lors de sa participation au Grenelle des Ondes en 2009, avait proposé plusieurs principes pour limiter l’impact des antennes relais, tout en continuant de téléphoner parmi eux : le principe de transparence (affichages des mesures), le principe « ALARA », le principe de légitimité (légitimité du maire dans la répartition des antennes), le principe de dissociation (différencier l’infrastructure et l’exploitation) ou encore le principe de gouvernance participative (démocratie).

 En 2012, la commission des affaires économiques a retenu la mise en place obligatoire d’un dispositif permettant de désactiver le Wifi des box par un bouton réservé à cet effet, l’interdiction de toute publicité vantant les appareils sans fil à destination des enfants de moins de 14 ans et l’éventualité d’un rapport sur l’abaissement de la puissance d’antennes-relais à un niveau aussi bas que techniquement possible (ALARA).

Conclusion

Invisibles et imperceptibles par nos sens, les ondes électromagnétiques passent inaperçues. Pourtant, elles sont présentes partout autour de nous et sont susceptibles de jouer un rôle dans l’apparition de maladies telles que le cancer. Alors même si tous les scientifiques ne s’accordent pas sur la nocivité des ondes électromagnétiques, il est important que chacun d’entre nous, et en particulier les enfants, adopte des gestes simples pour se préserver de cette pollution électromagnétiques. Surtout aujourd’hui où l’exposition concerne des millions de personnes, de plus en plus jeunes et exposées de plus en plus durablement.

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[18]      Rubin GJ, Das Munshi J, Wessely S. Electromagnetic hypersensitivity: a systematic review of provocation studies. Psychosom Med 2005; 67:224–232.

[19]      Belpomme D, Campagnac C, Irigaray P. Reliable disease biomarkers characterizing and identifying electrohypersensitivity and multiple chemical sensitivity as two etiopathogenic aspects of a unique pathological disorder. Rev Environ Health 2015; 30:251–271.

[20]      Environmental Mutagenesis and Genomics Society – 48th Annual Meeting : Environmental Health Sciences Bridging the Gap between Exposure, Mechanism and Public Health – P36 Evaluation of the genotoxicity of cell phone radiofrequency radiation in male and female rats and mice following subchronic exposure. Smith-Roe and all, research Triangle Park, NC, United States.

[21]      Plan santé environnement, 3ème plan national 2015 – 2019, partie W renforcer la dynamique en santé environnement dans les territoires, l’information, la communication et la formation.

 

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