Aspartame : Un édulcorant controversé à interdire ?
Lors de la journée internationale de lutte contre le cancer, le 4 février dernier, est sortie une pétition en faveur de l’interdiction de l’aspartame à l’échelle européenne lancée conjointement par la Ligue contre le cancer, Foodwatch et Yuka. Avec près de 300 000 signatures en l’espace de 2 semaines, les associations espèrent atteindre le million afin de pousser à une action de la part des décideurs de l’Union Européenne. Selon ces associations, le principe de précaution dans l’article 191 du Traité sur le fonctionnement de l’Union Européenne devrait pousser l’interdiction de l’usage d’aspartame en Europe. Mais pourquoi cette polémique autour de l’aspartame ? Tout simplement pour le risque cancérigène de cet additif.
L’aspartame qu’est ce que c’est ?
L’aspartame (E951) est un édulcorant artificiel largement utilisé dans l’industrie agroalimentaire comme alternative au sucre. On le retrouve dans plus de 2 500 produits en Europe, y compris dans des sodas « light », yaourts « zéro sucre », chewing-gums sans sucre et même des plats préparés et des médicaments (présent dans près de 600 médicaments selon le Ministère de la Santé)[1] dont certains destinés aux enfants. On le retrouve également dans les dentifrices destinés aux enfants et montre ainsi l’ampleur de son utilisation dans l’industrie alimentaire. Selon un sondage de Yougov conduit pour Foodwatch environ 40 % des Européens disent consommer régulièrement des préparations contenant de l’aspartame[2].
Un édulcorant classé « peut-être cancérogène »
D’après l’article de Mathilde Touvier, coordinatrice de l’étude Nutrinet-Santé initiée en 2009, paru dans la revue PLOS Medicine, la consommation d’aspartame augmenterait de 15 % le risque de développer un cancer[3].
En 2023, l’Agence internationale de recherche sur le cancer (CIRC), une branche de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), a classé l’aspartame comme « possiblement cancérogène » (groupe 2B). Cette classification repose sur des indices limités montrant un lien potentiel avec certains cancers, en particulier le cancer du foie[4].
Cette décision a été renforcée par une étude de l’INSERM publiée en 2022 qui a suivi plus de 100 000 Français et a révélé un lien entre la consommation d’aspartame et un risque accru de cancers, notamment le cancer du sein et ceux liés à l’obésité[5].
Selon Foodwatch, certains scientifiques estiment que l’aspartame aurait dû être classé « cancérogène probable » (groupe 2A), soit un niveau au-dessus de sa classification actuelle[6].
D’autres risques pour la santé
En plus du cancer, plusieurs recherches montrent que l’aspartame pourrait :
- Augmenter le risque de maladies cardiovasculaires[7]
- Accroître le risque de diabète de type 2[8]
- Perturber le microbiote intestinal, ce qui pourrait affecter la digestion et l’immunité[9]
Pourquoi l’aspartame est-il toujours autorisé ?
Malgré ces risques, l’aspartame demeure autorisé en Europe. L’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) maintient une dose journalière admissible (DJA) de 40 mg/kg de poids corporel[10]. Concrètement, une personne de 70 kg devrait boire environ 9 canettes de soda contenant 300 mg d’aspartame par jour pour dépasser ce seuil[11]. Cela présente un risque de 1.1 et s’apparente à celui de la pilule contraceptive. En effet, l’utilisation prolongée de cette méthode de contraception est associée à un risque de 1.2 pour le cancer du sein[12].
Cependant, plusieurs critiques dénoncent le manque de transparence des régulateurs. Les autorisations de mise sur le marché reposeraient principalement sur des études confidentielles financées par l’industrie, ce qui alimente une fabrique du doute pour retarder d’éventuelles restrictions et présente l’aspartame comme un enjeu économique majeur[13].
On peut tout de même voir une évolution de la situation. En effet, le recours à l’aspartame est passé de 1.8 % à 0.4 % des produits en 10 ans d’après un rapport de mars 2024 de l’Agence nationale de sécurité sanitaire (ANSES)[14].
Comment repérer et limiter sa consommation d’aspartame ?
Bien que des démarches soient en cours pour faire interdire cet additif à l’échelle européenne par certaines associations, il est important que chacun sache repérer l’aspartame dans leur produit du quotidien. Mais comment l’identifier ?
- Cherchez le code E951 sur les emballages.
- La mention « contient une source de phénylalanine » indique aussi la présence d’aspartame.
Attention : un autre édulcorant contenant de l’aspartame, le sel d’aspartame-acésulfame (E962), peut être utilisé.[15]
Pour éviter tout risque pour la santé, la meilleure solution est bien sûr de changer certaines habitudes de consommation. Dr Gérald Kierzek, directeur médical de Doctissimo, affirme que l’aspartame est «200 fois plus sucré en termes de goût que le sucre» et ne réduit aucunement l’addiction au sucre dans le cerveau.
Il est important de rappeler par ailleurs que dans sa dernière analyse, l’Anses avait conclut qu’aucun bénéfice de la consommation d’édulcorants intenses n’avait été démontré sur le contrôle du poids, la glycémie chez les sujets diabétiques ou l’incidence du diabète de type 2[16].
Voici donc une liste de conseils pour protéger sa santé :
- Privilégiez des alternatives naturelles comme le miel ou le sirop d’érable en quantité modérée
- Évitez les sodas et les produits « sans sucre » qui contiennent des édulcorants.
- Privilégiez une alimentation peu ou non transformée pour limiter l’exposition aux additifs.
[1] Dans quels aliments trouve-t-on de l’aspartame, édulcorant possiblement cancérogène ? – La Voix du Nord
[2] L’aspartame demeure autorisé, près de deux ans après son classement comme « cancérogène possible »
[3] Où en est réellement la recherche sur les liens entre aspartame et risque de cancer ?
[4] Publication des résultats de l’évaluation des dangers et des risques liés à l’aspartame
[5] Où en est réellement la recherche sur les liens entre aspartame et risque de cancer ?
[6] L’aspartame demeure autorisé, près de deux ans après son classement comme « cancérogène possible »
[7] Aspartame : pour son interdiction dans l’Union européenne
[8] Ibid.
[9] Ibid.
[10] L’EFSA finalise l’évaluation complète des risques associés à l’aspartame et conclut à sa sécurité aux niveaux actuels d’exposition | EFSA
[11] Où en est réellement la recherche sur les liens entre aspartame et risque de cancer ?
[12] Cancer et aspartame : une hystérie médiatique qui détourne des vrais risques
[13] L’aspartame demeure autorisé, près de deux ans après son classement comme « cancérogène possible »
[14] Où en est réellement la recherche sur les liens entre aspartame et risque de cancer ?
[15] Dans quels aliments trouve-t-on de l’aspartame, édulcorant possiblement cancérogène ? – La Voix du Nord
[16] Les édulcorants intenses | Anses – Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail