Les brèves de l'ASEF - Spécial Cadmium -

Bonjour à toutes et à tous,

Brèves spécial Cadmium : l’ASEF lance l’alerte sur les risques liés au cadmium.

Bonne lecture,
Prenez bien soin de vous et de vos proches.

 

À l’heure où la Commission européenne annonce le renouvellement de l’autorisation du glyphosate, l’ASEF alerte sur les risques liés au cadmium. Le ministère de l’Agriculture et de la Souveraineté Alimentaire a d’ailleurs lancé une consultation publique sur le sujet mais les recommandations semblent bien en deçà de l’acceptable. Parmi les personnes les plus exposées, les enfants notamment à cause des céréales du petit déjeuner. Explications.

Qu’est-ce que le cadmium ?

Le cadmium, métal lourd cancérigène, est omniprésent dans notre environnement et peut entraîner des risques pour la santé de l’Homme, exposé principalement via l’alimentation. En cause, selon l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses), les épandages d’engrais minéraux phosphatés par les agriculteurs. Le cadmium pénètre facilement dans les végétaux par leurs racines et entre ainsi dans la chaîne alimentaire.

Quels risques pour la santé ?

L’exposition orale prolongée de l’homme au Cadmium induit des néphropathies, des maladies osseuses, des troubles de la reproduction et un risque accru de cancer pour plusieurs organes (poumon, prostate, reins et pancréas).

Santé Publique France (SPF) alertait en 2021 « le cadmium est suspecté de jouer un rôle dans l’accroissement majeur et extrêmement préoccupant de l’incidence du cancer du pancréas ». Le cancer du pancréas sera dans les années 2030-2040 la deuxième cause de mortalité par cancer, d’après la société nationale française de gastro-entérologie. La France compte d’ailleurs parmi les 10 pays ayant le plus grand nombre d’apparition de nouveaux cas. 

En effet, le cadmium agit sur les mitochondries, induit un stress oxydatif, entraînant des dommages aux protéines, aux lipides et à l’ADN. Le cadmium diminue l’activité des enzymes de réparation de l’ADN, influençant la prolifération du cycle cellulaire et stimulant la cancérogenèse.

Les Français, particulièrement touchés

Malheureusement, les engrais importés en France viennent d’une région du monde où la présence de Cadmium est trop importante pour les objectifs sanitaires. Les sols accumulent le cadmium qui ne peut en sortir que par les plantes.

Chez les adultes français, l’imprégnation moyenne au cadmium mesurée entre l’étude ENNS (2006-2007) et l’étude ESTEBAN (2014-2016) a augmenté de 75%. Cette surimprégnation qui touche 47% des adultes est également particulièrement inquiétante pour les enfants dont 18% dépassent déjà la concentration critique de cadmium urinaire définie par l’ANSES; notamment chez ceux qui mangent des céréales au petit déjeuner. À titre d’exemple, une étude aux Etats-Unis montrait un taux moyen d’imprégnation des moins de 18 ans plus de 4 fois inférieur à la France.

Comment décontaminer les français ? 

Dans sa publication de 2021, l’ANSES précise quel que soit l’engrais et le scénario utilisés, un flux inférieur à 2 g Cd/ha sur 1 an réduit à la fois l’accumulation dans les sols et le transfert de cadmium dans la chaîne alimentaire. Cela correspond à une teneur en cadmium inférieure ou égale à 20mg/kg dans les engrais minéraux phosphatés.

Les arrêtés et décrets proposés, en consultation publique jusqu’au 29 novembre, proposent bien la teneur de 2 grammes par hectare mais 60 milligrammes par kilogramme d’engrais (60mg/kg). Cette valeur de 60mg/kg a déjà été adoptée en Europe en 2019 mais la France, malgré les alertes de SPF, autorisait jusqu’ici encore 90mg/kg. Plusieurs pays européens (Finlande, Slovaquie…) ont déjà adopté pour leurs territoires des valeurs de 20mg/kg, préconisées par l’ANSES.

Une question reste en suspens : comment les agriculteurs vont-ils pouvoir respecter cette valeur à l’hectare sachant que, si le produit vendu respecte la limite de 60mg/kg (un logo “CE” assure de son respect potentiel), la teneur réelle, elle, n’est pas du tout mentionnée ! On peut donc penser que la contamination des Français, déjà l’une des plus importantes au monde, (si cette valeur est maintenue) va continuer d’augmenter. « Une programmation de baisse progressive à 40mg/kg puis à 20 mg/kg a été proposée mais les textes présentés ne reprennent pas cette indispensable évolution », regrette Pierre Souvet, président de l’ASEF.

On notera que l’alimentation biologique, qui n’utilise pas ces engrais chimiques, contient en moyenne moins de 48% de cadmium d’après l’étude Baranski (2014). Acheter ces engrais dans des pays où les gisements sont moins contaminés ou décontaminer localement la production, peut faire monter les prix. Une aide aux agriculteurs pour qu’ils n’aient pas à supporter ce surcoût éventuel permettrait de limiter ce risque sanitaire. 

Santé Publique France définit l’exposition environnementale au cadmium comme “un problème de santé publique en France”.

SOURCES

  • Oleko Amivi, Fillol Clémence, Saoudi Abdessattar et al., Imprégnation de la population française par le cadmium. Programme national de biosurveillance, Esteban 2014-2016, Santé Publique France, Juillet 2021. 
  • Avis de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES) relatif à l’Exposition au cadmium (CAS n°7440-43-9) – Propositions de valeurs toxicologiques de référence (VTR) par ingestion, de valeurs sanitaires repères dans les milieux biologiques (sang, urine, …) et de niveaux en cadmium dans les matières fertilisantes et supports de culture permettant de maîtriser la pollution des sols agricoles et la contamination des productions végétales, Juin 2019.
  • Note d’appui scientifique et technique de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail relatif à la recommandation de niveaux en cadmium dans les matières fertilisantes permettant de maîtriser la contamination en cadmium des sols et des productions agricoles et l’exposition de la population humaine, Novembre 2021. 
  • Carne G, Leconte S, Sirot V, et al., Mass balance approach to assess the impact of cadmium decrease in mineral phosphate fertilizers on health risk: The case-study of French agricultural soils. Sci Total Environ. 2021 Mar 15.
  • Junjie Huang, Veeleah Lok, Chun Ho Ngai et al, Worldwide Burden of, Risk Factors for, and Trends in Pancreatic Cancer, Gastroenterology, October 12.
  • Genchi G, Sinicropi MS, Lauria G, et al., The Effects of Cadmium Toxicity, Int J Environ Res Public Health. 2020 May 26.
  • Djordjevic VR, Wallace DR, Schweitzer A, et al., Environmental cadmium exposure and pancreatic cancer: Evidence from case control, animal and in vitro studies, Environ Int. 2019 Jul.
  • Fan Y, Tao C, Li Z, et al., Association of Endocrine-Disrupting Chemicals with All-Cause and Cause-Specific Mortality in the U.S.: A Prospective Cohort Study, Environ Sci Technol. 2023 Feb 21. 
  • Song Jk, Luo H, Yin Xh, et al., Association between cadmium exposure and renal cancer risk: a meta-analysis of observational studies. Sci Rep. 2015 Dec 11.
  • Barański M, Srednicka-Tober D, Volakakis N, et al., Higher antioxidant and lower cadmium concentrations and lower incidence of pesticide residues in organically grown crops: a systematic literature review and meta-analyses, Br J Nutr. 2014 Sep 14.