Tribune du collectif AIR-SANTE-CLIMAT- Le chauffage au bois
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Cette tribune a été adressée à Madame la Ministre de la Transition écologique, Barbara Pompili ainsi qu’à Monsieur le Ministre des Solidarités et de la Santé, Olivier Véran.
Notre collectif AIR-SANTE-CLIMAT composé de médecins, de chercheurs et de responsables associatifs a pour objectif d’alerter sur l’impact de la pollution atmosphérique sur la santé et de proposer des solutions pour améliorer la qualité́ de l’air. Notre combat est celui de la vérité scientifique.
Le chauffage au bois gagne du terrain chaque année en France. Économique, il est plébiscité par toujours plus de Français et il est toujours promu par les pouvoirs publics en tant qu’énergie renouvelable. Avec près de 8 millions de ménages qui se chauffent au bois, la France est le premier pays européen utilisateur de bois-énergie. Dans le cadre de la politique de protection de l’environnement, la loi relative à la transition énergétique du 14 août 2015 prévoit d’en développer encore l’usage.
Pourtant, le chauffage au bois, en particulier à bûches, est l’un des principaux responsables des émissions de particules dans l’air au niveau national. Il dégage d’importantes émissions polluantes tels que les particules fines, très fines et ultrafines, les hydrocarbures aromatiques polycycliques (35 fois plus de HAP cancérigènes que le fioul domestique, quand les chauffages au gaz et à l’électricité n’en émettent pas du tout), les oxydes d’azote, le benzène, les composés organiques volatiles, le monoxyde de carbone, lesquels constituent des cancérogènes et affectent les systèmes respiratoire et cardiovasculaire. Le rapport de l’Inéris[1} publié en 2018 a d’ailleurs souligné le caractère délétère de ce mode de chauffage.
Paradoxalement, une étude publiée par Airparif[2] a révélé que seuls 6 % des foyers interrogés pensent que le chauffage au bois peut être une source de pollution de l’air. Ceci traduit un manque d’information particulièrement important.
Malgré ces constats, en France, aucune disposition ne prévoit une limite et un contrôle du niveau des émissions à la sortie des cheminées ou n’exige l’installation d’un catalyseur ou d’un filtre à particules. Seul un ramonage au moins une fois par an est obligatoire.
Par ailleurs, les foyers ouverts à usage principal restent autorisés dans la plupart des régions.
Aujourd’hui, si l’on est incommodé par les émissions de la cheminée du voisinage, la seule disposition existante est le « trouble anormal du voisinage » en vertu des articles 544, 1240 et 1241 du code civil.
Afin de préserver la santé des populations, nous, le collectif Air-Santé-Climat, constitué de médecins, de scientifiques et d’associations, sollicitons d’urgence :
- l’interdiction des cheminées à foyers ouverts, à usage principal comme en appoint ou en agrément, dans toutes les villes du territoire national
- une réglementation sur le niveau des émissions des cheminées domestiques avec l’obligation d’un contrôle technique périodique et de l’installation d’un catalyseur ou d’un filtre à particules
- ne pas encourager et diminuer les centrales à biomasse au bois.
- réduire les chaufferies collectives au bois, qui constituent d’énormes cheminées fortement émettrices de particules ultrafines, de NO2 et d’hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP) cancérigènes.
Parallèlement, nous demandons l’accélération du développement des énergies alternatives, telles que le solaire, et la mise en place d’aides aux particuliers de la part de l’Etat pour renouveler les installations de chauffage au bois.
Nous rappelons que le coût de la pollution de l’air a été estimé à 101,3 milliards d’euros par an en France [3].
Professeur Isabella Annesi-Maesano, Directrice de recherche INSERM / Directrice d’équipe labellisée INSERM et Sorbonne Université EPAR ;
Docteur Mallory Guyon, Collectif Environnement Santé 74 ;
Docteur Thomas Bourdrel, Collectif Strasbourg Respire ;
Docteur Gilles Dixsaut, Fondation du souffle contre les maladies respiratoires ;
Docteur Pierre Souvet, Association Santé Environnement France (ASEF) ;
Docteur Jean-Baptiste Renard, Directeur de recherche LPC2E-CNRS ;
Guillaume Muller, association Val-de-Marne en Transition.