16 juillet 2018

Le point sur la loi interdisant le téléphone portable dans les écoles - la synthèse du Dr Faitg

« Parlons aussi et surtout de santé Mesdames et Messieurs les députés ! »

Le 7 juin 2018, l’Assemblée Nationale a voté pour l’interdiction du téléphone portable dans les écoles : Article unique L.511-5. « – à l’exception des lieux ou, dans les conditions qu’il précise, le règlement intérieur l’autorise expressément, l’utilisation d’un téléphone mobile par un élève est interdite dans les écoles maternelles, les écoles élémentaires et les collèges. »

Dr Faitg, anesthésiste et membre de L’ASEF, donne son point de vue sur cette loi et sur les risques sanitaires liés à l’utilisation du téléphone portable.

L’ASEF, impliquée dans une information claire et transparente sur les enjeux des polluants environnementaux, profite de cette occasion pour faire le point sur les enjeux de santé autour du téléphone portable.

Est-ce une loi satisfaisante pour la santé de nos enfants 

Comme le rappelle l’exposé des motifs de cette proposition, le Président de la République s’est engagé pendant la campagne électorale à interdire le téléphone portable dans les écoles primaires et au collège. Nous vous invitons à parcourir quelques extraits ce document :

  • « 93% des 12-17 ans possédaient un téléphone mobile en 2016. »
  • « Il est signalé de nombreux dysfonctionnements incompatibles avec les activités d’enseignement et l’amélioration du climat scolaire (pratiques malveillantes, cyber harcèlement, pornographie, etc. »
  • « L’absence d’utilisation du téléphone portable permettra de garantir aux élèves un environnement permettant l’attention, la concentration et la réflexion indispensable à l’activité… »
  • « Pendant les temps de recréation, l’usage du téléphone portable peut s’avérer néfaste en réduisant l’activité physique et en limitant les interactions sociales… »
  • « Il est donc nécessaire de consolider un cadre juridique pour permettre son interdiction… »

Comment ne pas se réjouir d’une telle prise de position ? Comment ne pas écrire : voilà un engagement respecté ?

Mais alors…? Rien de plus, pas un mot sur la santé, pas un mot sur les risques sanitaires des technologies telles que les téléphones portables et les antennes relais utilisant les champs électromagnétiques. [1]

Pourquoi ne trouve-t-on pas dans cette proposition de loi la nécessité d’une mise à disposition d’information auprès des élèves mais aussi des enseignants et de l’ensemble du personnel des établissements portant sur les risques sanitaires à court et long terme des téléphones portables ?

Pourquoi ne pas se référer aux recommandations du directeur général de  l’ANSES [2] M Roger GENET (Exposition aux radiofréquences et santé des enfants – Saisine n° 2012-SA-0091) dont on peut rappeler ici les conclusions ?

 « L’Agence recommande :

-Que des études complémentaires évaluent l’impact sanitaire et psychosocial (apprentissage scolaire, relations sociales et familiales, etc.) chez les enfants lié à l’usage des technologies de communication mobile, en raison notamment de phénomènes addictifs, de troubles, des rythmes circadiens, etc. ;

-que, dans l’attente, les parents incitent les enfants à un usage raisonné du téléphone mobile, par exemple en évitant les communications nocturnes, en limitant la fréquence et la durée des appels, etc. ; 

-De dissuader l’usage par les enfants de l’ensemble des dispositifs de communication mobile, par exemple en étendant à ces dispositifs les dispositions réglementaires interdisant la publicité ayant pour but direct de promouvoir la vente, la mise à disposition, l’utilisation ou l’usage d’un téléphone mobile par des enfants de moins de quatorze ans »

# Phonegate ! (La paternité de ce terme revient à pierre le Hir, le monde 23 décembre 2016, soupçons  sur les ondes des téléphones portables)

Le 12 octobre 2010, le ministère de la santé faisait publier au journal officiel le Décret n°2010-1207 et l’arrêté des modalités d’application concernant l’affichage informatif du protocole de dosimétrie appelé DAS (« débit d’absorption spécifique ») ou SAR (« specific absorption rate »

  • Qu’est-ce-que le DAS 

  • La valeur DAS est théoriquement la quantité d’irradiation maximum émise par un téléphone mobile qui est absorbée par les tissus, elle est exprimée en Watt par kilogramme de tissus de corps humain (W/kg). Il s’agit des effets thermiques des ondes c’est-à-dire l’augmentation de chaleur induite par le dispositif.
  • Pour le corps entier la valeur est de 0.08W/kg mais elle peut être dépassée au niveau de certains tissus, telles que la joue et l’orbite (1.1W/kg) chez les utilisateurs de téléphones portables, tout en restant inferieure à la limite de 2 W/kg pour la tête, ceci sur la base normative de périodes de 6 minutes qui est le temps de l’autorégulation du corps. Il n’existe pas de norme règlementaire après 6 minutes d’utilisation… d’un téléphone mobile (mais qui donc téléphone plus de 6 minutes ?).
  • De plus cette norme en vigueur en France, est issue des recommandations d’une organisation de droit privé allemande qui se base uniquement sur l’effet thermique de l’irradiation par les hautes fréquences artificielles micro-ondes.
    Enfin, ce DAS est calculé lorsque l’utilisateur du téléphone mobile l’utilise, non pas collé contre son oreille, (ce qui est l’usage courant !) mais calculé à une distance de sécurité qui est d’environ 2.3 cm de tous les tissus de la tête, oreille incluse. Cette zone de sécurité est à mettre en lien avec l’élévation des fréquences (3G et suivantes) qui entraine une réduction de la longueur d’onde et par effet physique une augmentation de l’énergie et de la chaleur dans les tissus (plus de G, plus de pénétration des ondes dans notre corps, plus de lésions)
    • Des normes non-respectées

     Un peu d’histoire :

  • Ce n’est qu’en juillet 2016 dans un rapport d’expertise intitulé « ondes des radiofréquences et santé des enfants » que l’agence nationale de sécurité sanitaire (ANSES) a révélé que les tests réalisés sur 95 téléphones portables par l’agence nationale des fréquences (ANFR) en 2015 avaient montré que 9 téléphones portables sur 10 testés au contact de la peau d’adultes et d’enfants dépassaient les seuils règlementaires de 2 W/kg, dont certains de plus de 3 fois.

    Ainsi entre le DAS affiché fièrement dans les notices et le DAS réel au contact de la peau, il y a souvent un coefficient multiplicateur de 10, soit 3 fois la norme européenne et près de 10 fois la norme américaine. Cette dernière impose pour les tests l’utilisation d’un paramètre de 1 gr de tissu au lieu de 10 « norme européenne » et un temps de communication téléphonique de 30 mn au lieu de 6 mn « norme européenne »).

    • Un scandale qui porte bien son nom

  • En lien avec le « dieselgate » un scandale industriel et sanitaire lié à l’utilisation par le groupe Volkswagen, de 2009 à 2015, de différentes techniques visant à réduire frauduleusement les émissions polluantes…  Le « phonegate » a permis de dénoncer au mois de juillet 2016 une faillite complète de la régulation internationale en permettant aux industriels de favoriser la performance du portable au détriment de la santé des utilisateurs. Curieusement les résultats de cette étude n’ont pas été publiés immédiatement, mais seulement après de longues démarches juridiques.

     – Les industriels se sont protégés en mentionnant dans leurs notices qu’il faut garder une distance entre le Smartphone et le corps en particulier si l’utilisateur est un enfant ou un adolescent. Préconisation totalement irréaliste et qui ne sera lue par personne…
    – Les industriels protègent aussi leurs actionnaires mais pas les utilisateurs en leur signifiant les risques sur une utilisation importante du téléphone portable.

Avant même que cela chauffe… Les effets « non thermiques » dits biologiques des champs électromagnétiques : la face cachée de l’iceberg !

L’exposition massive aux champs électromagnétiques devient de plus en plus préoccupante, parce qu’elle provoque, à court, moyen et long terme, un stress cellulaire oxydatif, une modification en cascade des mécanismes cellulaires et déclenche de plus en plus de pathologies. Des milliers d’études scientifiques sur le vivant (humain, animal et végétal) ont établi  l’impact des différentes fréquences et intensités des émetteurs,  en fonction de la durée d’exposition et de la proximité des sources (antenne relais, wi-fi, téléphone portable, téléphone sans fil, compteurs linky etc.).

  • Le « National Toxicology Program »

Fondé en 1978 aux Etats Unis, le NTP (National Toxicology Program) joue un rôle critique dans la production, l’interprétation et le partage des informations toxicologiques pour des substances potentiellement dangereuses de notre environnement. Le NTP a évalué plus de 2800 substances environnementales et leurs effets sur la santé.

L’étude, commandée en 1999 par la US Food and Drug Administration (FDA), a coûté 25 millions de dollars et portait sur 1568 rats et 1512 souris. Pendant 2 ans, la moitié fût exposée aux ondes neuf heures par jour, par cycle intermittent de 10 minutes, tandis que l’autre groupe n’était pas exposé. Les animaux étaient exposés aux fréquences et pulsations typiques des deuxièmes et troisièmes générations (2G, 3G) de téléphonie mobile, utilisées depuis plus de 20 ans.

Le comité du « National Institute for Environmental Health Sciences » (NIEHS) s’est tenu du 26 au 28 mars dernier. Après 3 jours d’audience, le comité a conclu qu’il y avait une preuve claire d’activité cancérigène. Au total, 5.5% ou 30 des 540 rats mâles exposés aux radiations ont développé un cancer du cœur ou du cerveau (gliome), et 16 autres des cellules précancéreuses, contre aucun des 90 rats contrôlés. Et pas moins de 13.5% des rats les plus exposés ont eu l’un de ces 3 effets.

Les résultats du NTP sont corroborés par 3 études antérieures dans le cadre desquelles des rats avaient été exposés à des doses de RF/micro-ondes encore plus faibles (x3 plus de cancers). Ces mêmes tumeurs (schwannome, gliome) ont été observées dans l’étude de l’institut Ramazzini en Italie sur des rats exposés à des émissions plus faibles d’antennes cellulaires.

Alors comment ne pas rappeler la conclusion du Dr Anthony B. Miller, professeur émérite d’épidémiologie à l’université de Toronto et conseiller de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) en la matière :

« Les preuves animales et humaines, le fait que le risque augmente si l’exposition aux radiofréquences débute en bas âge et que l’incidence du gliome augmente dans plusieurs pays dans les territoires à proximité du lieu où est appliqué le téléphone portable, et en particulier chez les jeunes, «confirme de façon définitive que les radiations de radiofréquences sont un cancérogène humain de catégorie 1 »

Technologie 5G

Le marché des Smartphones a atteint un âge de raison. Les gens gardent désormais souvent leur appareil trois ans contre deux auparavant (perso ça fait 5 ans). En cause, entre autres, le retournement du marché chinois soit 1/3 des volumes mondiaux en baisse de 21 %. Le marché indien pourrait sauver la mise, et puis le rêve de tous les opérateurs… la 5G, un internet mobile ultra rapide. Cela pourrait relancer l’attrait pour les Smartphones ultra haut de gamme et/ou à grand écran. Rappelons que La 5G requise par « l’internet des objets » (IdO) pénètre plus profondément dans les tissus vivants et que les conséquences sanitaires sont évidentes, suite à ce qui vient d’être écrit.

Il sera nécessaire d’installer au minimum 1 million de micro antennes G en France distantes d’environ 100 mètres les unes des autres afin que les utilisateurs ne décrochent pas. Non, vous ne rêvez pas !  Enfin ces antennes devront être au plus près des utilisateurs et seront disposées sur le mobilier urbain ou les lampadaires.

Le problème : les arbres font obstacle au bon rendement des faisceaux radiatif de la 5G. En conséquence il est constaté dans certains pays et en France l’abattage massif d’arbres en ville.

Et là, c’est la double peine :

Encore et toujours plus d’ondes et plus de maladies… Moins d’arbres c’est moins de nature, moins d’épuration du CO2, des villes déshumanisées… Saurons-nous redoubler de vigilance ?

Pour conclure

Juin 2018 : « Une forte utilisation du téléphone portable entraînerait chez les étudiants, une baisse de leurs résultats scolaires et de leur qualité de vie, affirme une étude américaine ».

Oui, nous pouvons nous féliciter sur cette volonté affichée d’interdire l’usage des téléphones portables par les élèves dans les écoles et les collèges. Je suis sûr que les personnels enseignants et d’encadrement auront à cœur de montrer l’exemple.

Non, je ne peux imaginer un engagement aussi fort sans qu’il soit fait état des risques sanitaires du téléphone portable.  Permettez-moi de vous encourager, vous, personnel de santé afin d’inciter votre député pour amender cette proposition de loi et faire que la santé de nos jeunes soit au centre de cette réflexion.

Pourquoi ne pas imaginer des dispositions réglementaires concernant la publicité, l’utilisation, la vente et l’utilisation d’un téléphone portable avant l’âge 14 ans ?

Bibliographie

[1] Ce qui compte, ce n’est pas tant le type d’émission du champ électromagnétique (CEM)  que l’ensemble des CEM émis et la durée d’exposition.

[2] ANSES : agence nationale de sécurité sanitaire alimentation, environnement, travail

 

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