3 juillet 2017

Les néonicotinoïdes : où en est-on - la synthèse de l'ASEF

Comprendre ce que sont les néonicotinoides

Les néonicotinoïdes sont des pesticides, plus particulièrement des insecticides ayant une action sur le système nerveux des insectes. La famille des néonicotinoïdes comprend 7 molécules : l’acétamipride, la clothianidine, le dinotéfurane, l’imidaclopride, le nitenpyrame, le thiaclopride et le thiaméthoxame. On retrouve ces substances dans de nombreux produits pour le traitement des arbres et des plantes.  Ce sont généralement des dérivés chlorés qui ciblent les récepteurs nicotiniques de l’acétylcholine dans le cerveau.

Leur utilisation

Les néonicotinoïdes sont utilisés principalement en agriculture, mais également par les particuliers ou les entreprises. Ce sont les insecticides les plus utilisés dans le monde pour la protection contre les insectes parasites des cultures et des animaux, dans les élevages industriels (volailles ou ovins par exemple) et également pour les animaux domestiques (colliers insecticides). Les néonicotinoïdes représentent en volume 25% des ventes totales d’insecticides dans le monde.

Ces produits sont utilisés de façon classique par épandage dans le sol ou pulvérisation sur la végétation, mais également par enrobage des semences.

Les effets sur l’environnement

Les effets des néonicotinoïdes sur l’environnement commencent à être bien connus. Ces composés sont faiblement biodégradables et leur effet toxique est persistant. Ils sont également très diffusables dans l’environnement (via la migration dans les sols et la contamination des nappes phréatiques). De nombreuses espèces vivantes non ciblées par ces composés sont d’ailleurs touchées, qu’il s’agisse de prédateurs d’insectes (oiseaux, rongeurs, chauve-souris) ou d’espèces vivant dans les sols (vers de terre). Quant aux semences enrobées d’insecticides, elles sont responsables du décès des oiseaux qui les consomment.

La majorité des substances sont d’ailleurs utilisées de manière systémique, avec l’enrobage des semences, ce qui fait que la plante s’imprègne du produit tout au long de sa croissance. Cette imprégnation fait que même le lavage des aliments ne permet pas de les débarrasser des pesticides. Selon les données du ministère américain de l’agriculture, plus de la moitié des échantillons de fruits et légumes testés contiennent des traces de plusieurs de ces substances.

La disparition des abeilles

Chaque année, en France, 30% des colonies d’abeilles disparaissent. Or avant 1995, date de l’apparition des néonicotinoïdes sur le marché français, les mortalités avoisinaient seulement les 5%.

Les néonicotinoïdes sont particulièrement connus pour être impliqués dans la disparition des abeilles. Plusieurs études scientifiques ont mis en évidence la toxicité de ces insecticides sur les abeilles et les bourdons.

L’Autorité Européenne de Sécurité des Aliments (AESA) a identifié de nombreux risques pour les abeilles, notamment pour la clothianidine, l’imidaclopride et le thiaméthoxame. Ils peuvent ainsi avoir des effets aigus et chroniques sur la survie et le développement des colonies d’abeille, leur comportement et leurs larves. La pollinisation est également très impactée [1].

Une étude récente montre que certains néonicotinoïdes ont un effet sur la fertilité des abeilles mâles, entraînant une réduction de la quantité de sperme mais également une diminution de la viabilité des spermatozoïdes [2].

Les effets sur la santé

L’impact des néonicotinoïdes sur la santé humaine a été très peu étudié jusqu’à récemment. Une étude de 2012 suggère que ces pesticides pourraient affecter le développement cérébral [3]. Une revue de la littérature scientifique publiée en février 2017 rapporte quant à elle des associations avec des conséquences développementales ou neurologiques défavorables : augmentation du risque d’autisme, de troubles mnésiques, de malformation cardiaque congénitale ou d’anencéphalie [4].

Règlementation

En France, plusieurs mesures ont été prises au sujet des néonicotinoïdes. En 1999, l’utilisation de l’imidaclopride a été interdite sur le tournesol, suivi en 2004 par une interdiction sur le maïs.

A la suite de l’avis de l’AESA, la Commission Européenne a suspendu en 2013 l’utilisation des trois néonicotinoïdes pour une durée de 2 ans. En France, le projet de loi sur la biodiversité de 2015 a été amendé afin d’interdire les néonicotinoïdes dès 2016.

En 2016, le projet de loi « pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages » a été voté par l’assemblée nationale ; les néonicotinoides ont été interdits à partir du 1er septembre 2018 pour l’ensemble des cultures agricoles, quels que soient les usages (pulvérisations, enrobage, traitement des sols). Il existe cependant des dérogations jusqu’au 1er juillet 2020 lorsqu’il n’existe pas d’alternative, exceptions décidées par un arrêté ministériel.

En juin 2017, il a été brièvement évoqué un retour sur ce texte pour autoriser à nouveau les néonicotinoïdes mais ce retour a été abandonné.

En Europe, la règlementation est plus souple : trois molécules seulement (imidaclopride, clothianidine et thiaméthoxame) sont interdites partiellement depuis 2013 (autorisées sur les céréales à paille, les betteraves et durant la saison hivernale). Mais une nouvelle proposition d’ici juillet 2017 pourrait aligner la règlementation européenne sur la législation Française.

Conclusion

Si les effets des néonicotinoïdes sur la santé humaine restent assez peu étudiés à ce jour, leurs effets sur l’environnement et notamment sur les abeilles sont bien documentés. Il est de plus impossible de dissocier à moyen terme effets environnementaux et sanitaires, tant ceux-ci sont interdépendants. Si vous avez tendance en tant que particulier à utiliser ce type de produits, penchez-vous sur la question de l’agriculture biologique ou des moyens d’évitement des pesticides en agriculture ou dans votre jardin… La faune et la flore, ainsi que votre santé, ne s’en porteront que mieux !

Bibliographie

[1]        Stanley DA, Garratt MPD, Wickens JB, Wickens VJ, Potts SG, Raine NE. Neonicotinoid pesticide exposure impairs crop pollination services provided by bumblebees. Nature 2015; 528:548–550.

[2]        Straub L, Villamar-Bouza L, Bruckner S, Chantawannakul P, Gauthier L, Khongphinitbunjong K, Retschnig G, Troxler A, Vidondo B, Neumann P, Williams GR. Neonicotinoid insecticides can serve as inadvertent insect contraceptives. Proc R Soc B Biol Sci 2016; 283:20160506.

[3]        Kimura-Kuroda J, Komuta Y, Kuroda Y, Hayashi M, Kawano H. Nicotine-Like Effects of the Neonicotinoid Insecticides Acetamiprid and Imidacloprid on Cerebellar Neurons from Neonatal Rats. PLoS ONE 2012; 7:e32432.

[4]        Cimino AM, Boyles AL, Thayer KA, Perry MJ. Effects of Neonicotinoid Pesticide Exposure on Human Health: A Systematic Review. Environ Health Perspect 2016; 125.

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